Le management bienveillant : « Un effet contagieux très intéressant »

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Selon Philippe Rodet, médecin, consultant, spécialiste du stress au travail et co-auteur du livre (avec Yves Desjacques) « Le management bienveillant »1, cette philosophie est particulièrement efficace dans les domaines du social et de la santé.

Staffsocial : Comment le « management bienveillant » se traduit-il au quotidien et quelles problématiques soulève-t-il dans les secteurs du social et de la santé en particulier ?

Philippe Rodet : Un chef bienveillant respecte les autres et s’intéresse à eux. Il a envie de les faire progresser, grandir. Il sait susciter l’envie, il donne de l’autonomie et des objectifs justes. Il n’hésite pas à remercier, à féliciter. Il sait écouter, encourager en cas de difficultés, rassurer dans les périodes de crise. Toutes ces actions relèvent d’un bon sens que l’on a perdu.

Dans les secteurs du social et de la santé, c’est le caractère « contagieux » de cette notion qui est intéressant car il est peut-être plus développé qu’ailleurs. Par exemple, quand un chef de service hospitalier prend soin de ses infirmières, cela peut avoir un impact positif sur le rétablissement du patient. Une professionnelle de santé bien traitée fait mieux son travail et cela profite au malade. En résumé, pour faire du bien à l’autre, il faut aussi qu’on me fasse du bien. Il y a là un effet domino qui nous rappelle que le management bienveillant constitue une priorité dans ces secteurs.

Staffsocial : Pourquoi vous posez-vous en apôtre de cette idée ?

Philippe Rodet : Parce qu’en dix ans, le pourcentage de collaborateurs victimes d’un haut niveau de stress est passé de 38 à 61% et que, dans la même période, la motivation s’est effondrée. Parallèlement, entre 2013 et 2014, le pourcentage de salariés démotivés a augmenté de 12%, passant de 40 à 52%. Le manager doit favoriser le bien-être individuel plutôt que la performance collective.

Quand le stress augmente, des déséquilibres hormonaux se produisent, c’est scientifiquement prouvé. À l’inverse, en baissant le niveau de stress, la motivation augmente. J’ai vu les ravages qu’une surdose de tension pouvait provoquer dans mon premier métier, la médecine d’urgence. Ce mode n’est plus adapté aujourd’hui car le niveau de stress est à son comble.

Staffsocial : Comment s’applique-t-elle au quotidien ?

Philippe Rodet : Le management bienveillant s’adapte à n’importe quelle situation. Qu’on soit aide-soignante, marin ou fonctionnaire dans une mairie… la méthode est transposable partout. Car la racine du mal est commune. Moins les liens sociaux sont solides, plus le stress s’exprime. Aujourd’hui, les gens manquent de repères dans leur travail. Il faut leur faire prendre conscience que celui-ci est riche de sens. Cela passe évidemment par une meilleure communication Mais aussi des engagements concrets avec un suivi. Par un système d’emails, d’e-learning… il faut juste se sentir obliger de jouer le jeu. L’excellence est une exigence de comportement. Je suis en revanche sceptique sur la formation, laquelle me semble utile si l’on veut maîtriser un logiciel, mais non lorsqu’on souhaite modifier des comportements.

Staffsocial : Quelles sont les clés d’un management bienveillant ?

Philippe Rodet : Il faut augmenter les émotions positives. Plus une personne trouve du sens à son travail, plus elle dispose d’autonomie, plus elle est reconnue, plus elle est impliquée et fait preuve de créativité. Cette bienveillance, le manager doit d’ailleurs également en faire preuve envers lui-même. Il va lui arriver d’être maladroit, agressif, de se tromper, ce n’est pas grave. L’important est de le reconnaître.

Si on donne du sens, si on explique à chaque collaborateur à quoi il sert, en quoi il est utile, si on fixe des objectifs atteignables, en laissant un juste niveau d’autonomie mais aussi en se débarrassant des émotions négatives, alors le processus est bien engagé.

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