Myriam El Khomri préconise 92 300 postes d’aides-soignants et accompagnants supplémentaires

capture-decran-2016-12-02-a-16-10-06Publié le 29.10.2019 par Lydie Watremetz
Article Hospimedia

Supprimer le concours d’aide-soignant et créer 18 500 postes supplémentaires par an en Ehpad et à domicile jusqu’en 2025 font partie des 59 propositions de Myriam El Khomri pour relever le défi du vieillissement et remobiliser les professionnels.

Lorsque la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn a demandé début juillet à Myriam El Khomri d’imaginer un plan de mobilisation nationale pour restaurer l’attractivité des métiers du grand âge, le pari était risqué vu l’ampleur du challenge. La ministre a fixé dès le départ les grands axes de réflexion que la mission a suivis en partant des constats faits par Dominique Libault dans la foulée des concertations du début de l’année.

59 propositions
Après 150 auditions et 80 heures de visites de terrain, Myriam El Khomri et son équipe projet ont retenu 59 propositions (lire l’encadré ci-dessous). Pour eux, le défi « requiert l’implication active de plusieurs ministères, des conseils régionaux et départementaux, de l’Assurance maladie, des partenaires sociaux du secteur de l’autonomie, des opérateurs de compétences (Opco), du secteur public, des associations, des entreprises» (rapport à télécharger ci-dessous). Comme prévu la mission émet des suggestions sur les effectifs pour accroître le temps de présence auprès des âgés mais aussi la prévention de la pénibilité du travail, les perspectives de carrière diversifiées, sans oublier les formations et les compétences (lire nos articles ici et ).

450 M€ pour créer des postes
Pour frapper fort, la mission a ciblé les professionnels les plus faibles. Les cas des aides-soignants (AS) et accompagnants éducatifs et sociaux (AES) appelés aussi auxiliaires de vie ont été identifiés comme les deux grands métiers du vieillissement dont l’attractivité est la plus dégradée. « La baisse de 25% en six ans des candidatures aux concours d’accès à ces deux métiers est très révélatrice à cet égard», écrit la mission. La première mesure consiste donc à ouvrir 18 500 postes d’AS et d’accompagnants par an d’ici jusqu’en 2025 pour renforcer les effectifs avec un coût estimé à 450 millions d’euros (M€).

Revalorisation des plus faibles salaires
La deuxième mesure concerne les rémunérations. Myriam El Khomri a relevé que « les salaires de base des premiers niveaux d’emploi sont inférieurs au salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) dans plusieurs conventions collectives. C’est notamment le cas dans la convention de la branche aide à domicile (Bad) et dans celle des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs (Fehap)». La mission souhaiterait donc qu’une remise à niveau soit opérée au 1er janvier 2021 tout particulièrement dans les grilles des conventions collectives à domicile. Ce dispositif aurait un coût de 170 M€.

Simplifier l’entrée en formation
Pour attirer de nouvelles recrues, l’ancienne ministre du Travail suggère de faciliter l’entrée en formation en supprimant le concours d’accès en première année d’aide-soignant. C’est d’ailleurs la dernière formation paramédicale a encore sélectionner ses étudiants par un concours. Partant du principe qu’environ 60% des aides-soignants possédaient le niveau baccalauréat, la mission imagine que l’inscription aux études d’AS pourrait passer par le portail Parcoursup. Pour les autres, il faudra aménager le système. L’objectif est d’arriver dès 2020 à former aux métiers d’AS et d’AES deux fois plus de personnes qu’actuellement. La mission a constaté que ces professions reposaient en grande partie sur le savoir-être et l’empathie. Des qualités qui ne sont pas ciblées par le concours. Certaines personnes qui avaient véritablement la volonté de travailler avec cet esprit ont pu être refusées sans avoir pu faire les preuves de leurs qualités. La suppression du concours nécessiterait un financement d’1 M€.

Plus largement, la mission défend dans sa synthèse ses prises de positions en expliquant qu’elle « tente modestement d’apporter des réponses qui visent à porter une réforme structurelle, organique en ce sens que chacun de ses piliers se fait solidaire des autres [pour permettre] aux salariés d’être dans une dynamique, de retrouver de l’espoir, du soutien, des solutions concrètes face au malaise ressenti actuellement». Pour appuyer les changements impulsés, la mission recommande de mettre en place une campagne nationale de communication pour changer le regard de la société sur les personnes âgées et les professionnels. Quant à la suggestion de plateforme des métiers du grand âge, la mission l’a imaginée au niveau départemental. Elle la décrit comme un guichet qui serait chargé « d’organiser la mobilisation et la coordination, au niveau local, autour des formations aux métiers du grand âge, afin de susciter des vocations et de permettre aux candidats de réussir leur parcours de formation et leur insertion professionnelle».

Par ailleurs, les réflexions portées par Myriam El Khomri rejoignent en quelque sorte une autre mission animée par la députée Audrey Dufeu-Schubert sur le rôle et l’image des séniors dans la société en reprenant dans sa mesure n° 44 la proposition de créer un sénior Bafa (pour brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur). Ils pourraient être mis en place dès l’été 2020 dans les communes volontaires qui les emploieront avec le soutien financier de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). Ce dispositif participerait à la lutte contre l’isolement des âgés.

 

Quelques propositions de la mission El Khomri
La mission sur les métiers du grand âge a classé ses 59 propositions en cinq axes, les principales sont :
– Assurer de meilleures conditions d’emploi et de rémunération, en ouvrant de nouveaux postes, en rénovant les conventions collectives et en mettant en place une initiative nationale :

  • ouvrir 18 500 postes supplémentaires par an d’ici à fin 2024 (mesure n° 1) ;
  • remettre à niveau au 1er janvier 2021 les rémunérations inférieures au Smic dans les grilles des conventions collectives à domicile et prendre en compte l’impact financier associé dans la tarification pour les conventions collectives soumises à agrément national (mesure n° 2) ;
  • aller vers un Opco commun aux partenaires conventionnels du secteur (mesure n° 7) ;
  • négocier une offre nationale compétitive pour équiper les accompagnants à domicile de véhicules propres (mesure n° 8) ;
  • autoriser l’usage d’un macaron pour les intervenants à domicile (mesure n° 9) ;
  • aider à l’acquisition du permis de conduire en fin de formation (mesure n° 10).

– Donner une priorité forte à la réduction de la sinistralité et à l’amélioration de la qualité de vie au travail :

  • porter dans le cadre de la branche accident du travail et maladies professionnelles (AT-MP) un programme national de lutte contre la sinistralité ciblée sur les métiers d’aide-soignant et accompagnant (mesure n° 11) ;
  • intégrer après concertation avec les acteurs des objectifs et des cibles, propres à chaque établissement, de réduction de la sinistralité et de promotion de la qualité de vie au travail (QVT) dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (Cpom, mesure n° 12) ;
  • imposer 4 heures de temps collectifs par mois d’équipe à domicile et en Ehpad pour donner du sens à leur travail dans l’échange de pratiques (mesure n° 17) ;
  • mettre en place un baromètre national sur la qualité de vie au travail en Ehpad et service d’aide et d’accompagnement à domicile (mesure n° 18) ;
  • développer les groupements d’employeurs en les exonérant de TVA (mesure n° 19).

– Moderniser les formations et changer l’image des métiers :

  • mobiliser les plans d’investissement dans les compétences (Pic) dans le cadre des pactes régionaux (mesure n° 22) ;
  • supprimer le concours d’aide-soignant pour la formation initiale et l’apprentissage et assurer l’inscription dans les centres de formation via Parcours sup pour la formation initiale (mesure n° 24) ;
  • garantir systématiquement la gratuité de la formation, hors frais d’inscription, quelle que soit la situation du candidat (mesure n° 26) ;
  • porter à au moins deux le nombre de sessions annuelles dans tous les centres de formation d’AS et d’accompagnants à l’horizon 2021 pour la formation initiale (mesure n° 28) ;
  • réduire drastiquement l’éventail des diplômes reconnus dans le champ de l’accompagnement des personnes en perte d’autonomie (mesure n° 30) ;
  • porter à 10% d’ici 2025 la part des diplômes d’aide-soignant et d’accompagnant éducatif et social obtenus par la voie de l’alternance (mesure n° 32) ;
  • porter à 25% la part des diplômes délivrés chaque année dans le cadre de la VAE en privilégiant la VAE collective (mesure n° 34) ;
  • permettre à tous les professionnels exerçant auprès des personnes en perte d’autonomie d’accéder à une formation spécifique en gérontologie (mesure n° 36) ;
  • créer un campus des métiers du grand âge pour diffuser des connaissances de manière plus souple et moins coûteuse (mesure n° 41) ;
  • lancer une campagne nationale de communication pour changer le regard de la société sur les personnes âgées et les métiers du grand âge (mesure n° 42).

– Innover pour transformer les organisations :

  • reconnaître les glissements de tâches et les sécuriser dans le cadre de protocoles nationaux habilitant les aides-soignants et les accompagnants à les pratiquer (mesure n° 46) ;
  • favoriser la possibilité pour les employeurs de proposer des postes sur des doubles compétences (mesure n° 48) ;
  • reconnaître l’intérêt de la pratique avancée en gérontologie et soutenir son développement (mesure n° 49) ;
  • intégrer un stage en gériatrie dans les études de médecine (mesure n° 50) ;
  • innover dans la coordination territoriale des acteurs par la promotion d’un nouveau métier celui de care manager (mesure n° 51).

– Garantir la mobilisation et la coordination des acteurs et des financements au niveau national et dans les territoires :

  • réunir dans chaque département une conférence des métiers du grand âge chargée de définir une feuille de route 2020-2024 (mesure n° 54) ;
  • créer une plateforme départementale des métiers du grand âge chargée de mettre en œuvre un guichet unique de sécurisation des recrutements (mesure n° 55) ;
  • réunir un comité national des métiers du grand âge chargé de soutenir, de suivre et d’évaluer la mise en place des actions du présent plan de mobilisation nationale (mesure n° 56) ;
  • créer un observatoire national des métiers du grand âge fédérant les observatoires de branches dans le champ de l’autonomie et du grand âge (mesure n° 59).

 

Liens et documents associés
Plan de mobilisation nationale en faveur de l’attractivité des métiers du grand âge [PDF]

 

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