Le secteur du grand âge ne pourra pas faire l’impasse d’un renforcement des effectifs

capture-decran-2016-12-02-a-16-10-06Publié le 15.09.2020 par Cécile Rabeux
Article Hospimedia

La crise sanitaire a fait office de miroir grossissant sur les difficultés des Ehpad. Le congrès prescriptions et parcours des personnes âgées a permis de faire le point sur les priorités avec, au premier rang, l’augmentation des effectifs.

« La crise montre qu’il ne faut pas être dans le déni sur le sujet du grand âge. Il y a une certaine urgence à agir, surtout sur la question des métiers», estime Dominique Libault, président du Haut Conseil au financement de la protection sociale, lors du congrès prescriptions et parcours adaptés aux personnes âgées, organisé ces 15 et 16 septembre. Augmenter les effectifs en Ehpad et à domicile, revoir les formations, renforcer l’attractivité, les solutions font consensus parmi les participants à la table ronde consacrée au parcours de santé des aînés à l’épreuve de la crise Covid. « La crise a montré que la qualification est un vrai sujet, poursuit Dominique Libault. Il faut mettre en place le plus rapidement possible un vivier de formation.»

Autre constat partagé, celui d’une médicalisation insuffisante des Ehpad. Mais, sur ce point, les solutions proposées varient. « Un Ehpad sur deux n’a pas de médecin coordonnateur», indique le président du haut conseil. La crise a mis en lumière le manque de médecins à la fois coordonnateurs et prescripteurs en Ehpad, soulève Dominique Monneron, directeur général de la Fondation Partage et vie. Les établissements ne sont pas aujourd’hui équipés « pour héberger durablement des personnes malades et très contagieuses, poursuit-il. Cela suppose un lien avec l’hôpital». Il décrit en tout cas un modèle d’Ehpad « qui a résisté», malgré un premier moment de sidération. « Nous avons réussi à maîtriser les choses».

Pas de situation « d’explosion totale» en Ehpad

Ce constat, Nicolas Péju, directeur général adjoint de l’ARS Île-de-France, le dresse également. Si la « question des faiblesses est réelle», le modèle « n’a pas été remis fondamentalement en question. Il n’y a pas eu de situation d’explosion totale», précise-t-il. L’action des ARS a tourné principalement autour de deux axes, un « monitoring fin» et un « appui tous azimuts». En Île-de-France, 95% des 700 Ehpad ont recensé au moins un cas de mars à mai. Une trentaine d’Ehpad étaient concernés fin juin mais, depuis fin juillet, les indicateurs remontent et environ 90 établissements franciliens comptabilisent au moins un cas. Nicolas Péju met en lumière une situation « très dure» durant la crise sanitaire, « mais nous avons évité la catastrophe grâce à un contact quotidien avec les 700 Ehpad». La gestion de crise nécessitait de récolter des données. « En quelques jours nous avons mis en place un questionnaire régional.» Quant au soutien apporté aux structures, il était de plusieurs ordres, avec l’apport de matériel de protection mais aussi sur le plan des ressources humaines. « Nous avons injecté des milliers de ressources complémentaires dans le tissu des Ehpad.» Le directeur général adjoint appelle désormais à capitaliser sur ce lien qui s’est créé avec les établissements.

Quelle place pour l’HAD ?
« Je trouve étonnant qu’il soit aussi peu question de l’hospitalisation à domicile (HAD) alors que nous avons été à ce point présents», lance Élisabeth Hubert, présidente de la Fnehad. Si les Ehpad étaient au début frileux, les interventions se sont finalement multipliées. Sans « angélisme», elle constate que les structures ont été « au rendez-vous». Les établissements d’HAD ont ainsi enregistrés quatre fois plus d’interventions en Ehpad qu’habituellement, soit près de 4 000 prises en charge de personnes âgées entre mars et mai. Pour Élisabeth Hubert, il est irréaliste d’attendre la présence d’un médecin à temps plein au sein de chaque Ehpad. « Nous devons apporter aux résidents les moyens d’être soignés sur leur lieu de vie», insiste-t-elle, incitant à réintroduire le monde libéral en Ehpad. Pour les cas plus lourds « nous sommes là», ajoute-t-elle, regrettant que six mois après la crise, « nous recommençons à travailler en silo».

Tirer les conséquences opérationnelles
Marc Bourquin, conseiller stratégique de la FHF, apporte de son côté un point de vigilance. La crise n’est pas terminée, « la première chose dont il faut que l’on se préoccupe c’est la situation présente ». Si les connaissances ont largement progressé, les professionnels accusent aussi « une certaine fatigue ». Marc Bourquin revient également sur le confinement, soulignant qu’il ne sera pas possible de revenir à des mesures aussi drastiques pour les personnes âgées : « Nos aînés n’y survivraient pas. » Il estime néanmoins que « dans bien des cas il faudra revenir par exemple aux rendez-vous » en Ehpad pour les visites des familles. La FHF appelle aussi à une révolution des métiers et à prendre « à bras le corps l’objectif d’augmentation des effectifs ». Pour le conseiller, un minimum de temps médical disponible dans chaque Ehpad s’avère aussi nécessaire, tout comme la mobilisation des filières gériatriques.

Le directeur général du CHU de Montpellier (Hérault), Thomas Le Ludec, revient sur l’accompagnement apporté aux Ehpad. « Très vite avec l’ARS» une plateforme d’appui a été créée pour conseiller les structures dans la gestion de crise, raconte-t-il. Une plateforme qui a notamment mis en lumière les visions divergentes des gériatres et des infectiologues sur le parcours des personnes âgées. Cela a montré « tout l’intérêt du président de la commission médicale d’établissement » pour rapprocher les points de vue, ajoute-t-il. Un travail qui a mené à la création d’unités gériatriques Covid au sein de l’hôpital. Pour Thomas Le Ludec, une question se pose désormais : « Comment passer de l’exception à quelque chose qui fait système ?» La question est d’autant plus importante qu’elle permettrait « d’affronter différemment la grippe saisonnière qui est souvent sous-estimée et qui devrait être prise en compte de façon plus sérieuse». Loin de « tout triomphalisme, reprend-il, nous avons beaucoup appris et il faut avec méthode tirer toutes les conséquences opérationnelles».

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