Promouvoir la musique vivante dans les milieux du handicap

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“La musique est la langue des émotions”. Cette citation d’Emmanuel Kant pourrait être le leitmotiv de l’association Musique et Santé, qui oeuvre depuis plus de 20 ans dans les milieux hospitaliers et du handicap. Son objectif ? Promouvoir la musique vivante auprès d’un public encore trop privé de représentations artistiques.

La musique comme un lien fédérateur

L’association “Musique et Santé” a été créée en 1998 par Philippe Bouteloup, musicien, formateur et auteur de publications et livres sur la musique en milieu hospitalier. À l’origine de l’association, un constat : la musique est un langage commun et universel, qui permet de faire passer de nombreux messages, au-delà des langues. Elle est aussi vecteur d’émotion et de poésie.
Faire entrer la musique au sein des structures de santé et du handicap permet de créer une bulle de bien-être et de légèreté pour les patients en leur faisant oublier la maladie le temps d’un morceau. Pour Stève Thoraud, musicien, formateur et assistant de Philippe Bouteloup : « Humainement et artistiquement, on vit des choses très fortes dans la promiscuité d’une chambre d’hôpital. En tant que musicien, on cherche à créer un lien, une connexion entre deux personnes lors de ces interventions, c’est une émotion très différente de celle d’une salle de concert devant 200 personnes. »

Des musiciens, formés aux spécificités de la musique en milieu de santé, interviennent donc dans ces structures, au chevet des patients ou en déambulatoire, dans les couloirs de l’hôpital. « On travaille également en partenariat avec de grands orchestres, comme l’Orchestre de Paris-Philharmonie de Paris ou l’Orchestre National de France. Ce sont des musiciens de très haut niveau mais qui n’ont pas forcément les outils pour intervenir dans une chambre d’hôpital ou face à un enfant en situation de handicap. Dans ces cas-là, on a un rôle de médiateur, entre eux et l’établissement, pour préparer et accompagner l’intervention. »

Les actions de l’association donnent lieu à des moments très forts, chargés en émotion, à la fois pour les patients, mais aussi pour les musiciens. « J’ai souvenir d’un projet avec des enfants polyhandicapés et des musiciens de l’Orchestre de Paris où on a mis en place des ateliers adaptés » raconte Stève Thoraud « À la fin du projet, on a organisé une restitution sur la scène de la Philharmonie de Paris, les enfants se sont retrouvés à jouer sur cette scène mythique avec les musiciens devant leurs familles et les équipes soignantes. C’était un moment chargé en émotion et très valorisant pour les enfants. »

Si la plupart de ces projets ont dû être reportés pendant la crise, l’association s’est ré-inventée en créant une chaîne vidéo « De la musique pour garder le lien ». « Chaque jour, on partageait une vidéo des musiciens de l’association, des orchestres avec lesquels on travaille ou encore de nos parrains et marraines, figures emblématiques du monde de la musique. Au début de chaque vidéo, les musiciens la dédicaçaient à un service ou un établissement dans lesquels on intervient habituellement. Les équipes soignantes la relayaient auprès des patients, qui étaient très touchés par cette attention personnalisée. Grâce à cette opération, nous avons pu garder le lien et continuer à leur apporter une touche de légèreté et de douceur. »

La musique comme support thérapeutique

Stève Thoraud précise toutefois : « L’association n’a pas vocation à être thérapeutique. Même si on est sensible à l’apport de la musique dans le soin, c’est vraiment le domaine du soignant. C’est pourquoi c’est important de travailler main dans la main avec les équipes soignantes. »

Avant de monter un projet, « il y a tout un travail de l’ombre. On rencontre les équipes soignantes, on définit les personnes qui interviendront sur le projet, les personnes référentes sur le terrain et, surtout, on échange beaucoup sur les patients, sur leurs goûts et leurs besoins, mais aussi sur l’organisation de l’établissement. C’est grâce à ce travail en amont que l’on peut ajuster nos interventions. On peut passer d’une chambre avec un enfant d’un an à une chambre avec une jeune femme d’origine étrangère qui ne parle pas français, donc plus on a d’informations, mieux on s’adapte. »

En parallèle des interventions dans les établissements, l’association « Musique et Santé » organise des formations. Celles-ci sont à ouvertes aux musiciens qui souhaitent se spécialiser au champ du handicap par exemple, mais aussi aux soignants. « La demande peut émaner de l’établissement mais aussi des soignants eux-mêmes« , précise Stève Thoraud « Dans nos stages, nous avons des éducateurs, des aides-soignants qui ne sont pas spécialement musiciens mais qui ont envie de mettre en place des ateliers autour de la musique dans leurs établissements. »

Ces formations sont indispensables car « on ne peut pas calquer les méthodes pédagogiques habituelles avec des enfants qui ont un handicap visuel ou moteur par exemple« . Et la démarche de l’association est en train de s’institutionnaliser, se réjouit Stève Thoraud : « Nous créons un cursus de Musicien intervenant en milieux de santé avec l’Université d’Aix-Marseille, via un Diplôme Universitaire spécialisé. Notre objectif est que, d’ici quelques années, les actions autour de la musique – ou de l’art en général – dans ce type d’établissement soient pleinement intégrées. C’est une démarche qui doit devenir normale, qui a toute sa place dans le fait de prendre soin de l’autre. »

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Thèmes : Handicap

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